Cérémonie du centième anniversaire - Tricentenaire

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Cérémonie du centième anniversaire

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Cérémonie du centième anniversaire
de la mort de Notre Vénérable P. de Montfort
 
Voici le rapport que notre P. Duchesne fit à l'occasion de cette cérémonie et de la guérison subite de nos deux Sieurs Denise et Salvien.
 
Je, soussigné Yves-François Duchesne, prêtre missionnaire du Saint-Esprit, Supérieur général des Filles de la Sagesse, atteste devant Dieu les faits suivants dont les résultats seraient, s'ils sont prouvés juridiquement, l'existence d'un double miracle opéré par l'intercession de M. de Montfort, sur deux Filles de la Sagesse, le 29 avril 1816.
Ce jour, 29, fut célébré à Saint-Laurent-sur-Sèvre, dans l'église paroissiale où se trouve le tombeau de M. de Montfort, le centième anniversaire de la mort de ce célèbre missionnaire, reconnu pour l'Instituteur des missionnaires du Saint-Esprit et des Filles de la Sagesse. L'exact centenaire, 28, coïncidant avec le dimanche du Bon Pasteur, ce ne fut que le lundi qu'on put le célébrer.
Invitation avait été faite à tous les curés voisins de se rendre à cette sorte de fête chômée par les deux Congrégations formant la famille du vénérable défunt.
Dans la lettre d'invitation d'abord, puis dans l'espèce de panégyrique qui fut prononcé dans l'église par le soussigné, en qualité de Supérieur général des deux Congrégations, il était expressément déclaré qu'on ne prétendait célébrer l'office ni pour, ni par M. de Montfort : ni pour, de peur de contredire trop positivement l'opinion du peuple qui, depuis cent ans, visitaient son tombeau comme celui d'un saint ; ni par, afin de ne pas devancer le jugement de l'Eglise, ni même paraître le faire.
Une simple Messe d'action de grâces A rendre à Dieu pour les Enfants de M. de Montfort, surtout pour la grâce qu'il leur avait faite, en leur donnant un si bon père adoptif, voilà ce qui fut reconnu avant, pendant et après cette Messe solennelle, pour le seul objet de la solennité même ; et, ainsi tout le monde fut pleinement convaincu qu'on avait parfaitement suivi la lettre permissive et directive de Mgr de la Rochelle, en date du 19 avril 1814 et arrivée à Saint-Laurent le 23.
D'après ce préambule qui peut devenir nécessaire pour écarter tout soupçon de mauvaise foi dans le rapport de ce qui suit, je déclare que, sans avoir été prévenu, quoique Supérieur et dans ce moment directeur de la maison Chef-lieu, d'autres démarches des deux Sœurs ci-après dénommées, sinon que la plus infirme me demanda la veille d'être transportée au tombeau du Père de Montfort pour y communier, j'appris d'assez bonne heure le matin que cette Sœur nommée Denise s'en était retournée à la maison bien portante et avait laissé ses béquilles au tombeau de M. de Montfort, en signe de guérison miraculeuse obtenue par son intercession. Mes affaires de la cérémonie m'empêchèrent d'en savoir davantage avant le dîner que MM. les ecclésiastiques voulurent bien accepter à la Sagesse.
J'atteste que c'est pendant le dîner seulement que j'appris que la Sœur Saint-Salvien, ayant fait porter et toucher une chemise au tombeau de M. de Montfort et l'ayant revêtue, s'était trouvée aussi subitement guérie.
J'atteste qu'au sortir de la table, devant une trentaine d'ecclésiastiques et quatre laïques au nombre desquels était M. Hullin, médecin ordinaire de la maison qui, par conséquent depuis des années, connaissait l'état désespéré des deux Sœurs, je fus surpris plus que personne et non moins réjoui sans doute de voir apparaître dans la haute salle du Noviciat, une des deux Sœurs susdites, dans un état de santé, de liberté, de marcher, d'agir, de causer, de rire que je ne lui avais pas vu sûrement ni même espéré possible, depuis plusieurs années et notamment depuis trois mois que j'étais seul prêtre à la maison et dès lors obligé de lui porter la sainte Eucharistie, dans son lit à l'infirmerie, quand la maladie et surtout les vomissements ne la privaient pas du bonheur de communier. L'autre Sœur également guérie ne parut point là parce que la première avait été seulement demandée, comme ayant plus frappé par l'abandon de ses béquilles.
Des personnes de la compagnie et notamment plusieurs prêtres ayant paru saisis d'un religieux empressement de constater le miracle manifesté devant tout le monde, mon ferme dessein fut de n'aller pas si vite, afin d'aller plus sûrement dans cette affaire délicate, je me contentai priant M. le médecin, leur médecin ordinaire, de s'expliquer sur ce qu'il voyait et de donner le témoignage verbal, qu'il y avait, dans leur subite guérison, un effet, qui ne pouvait venir ni de la nature livrée à elle-même ni des remèdes curatifs connus de lui.
J'atteste que dans le droit et le devoir attachés à ma place de diriger sinon les enquêtes, du moins leur époque estimée la plus judicieuse, j'ai voulu différer jusqu'à ce jour 16 juin, près de deux mois après l'événement, l'écrit que je fais aujourd'hui, avec confiance que ce délai motivé selon moi sur la nécessité d'éprouver dûment la permanence de la guérison, avant même peut-être que d'appeler les trois médecins qui ont vu ces deux Sœurs en témoignage du genre et de la gravité de leurs maladies et infirmités qu'ils ont longuement traitées et toujours sans succès.
Je crois que, depuis cette cure que je crois pouvoir maintenant appeler miraculeuse, j'ai vu constamment, comme on voit, quand on examine sérieusement et en cas pareil, j'ai vu constamment ces deux Sœurs tout autres qu'avant cette époque pour la santé, pour la gaieté, gaieté pieuse très visiblement augmentée par leur assurance et déclaration naïve que Dieu a daigné faire en leur faveur un miracle sollicité de sa toute-puissante bonté par l'intercession de son fidèle serviteur le Père de Montfort.
J'atteste également que les deux Sœurs ainsi privilégiées, mais leur Mère Générale, mais les Sœurs pharmaciennes, mais toutes celles qui les ont connues malades et les voient si bien et si constamment bien portantes, m'ont pressé plus d'une fois de faire le rapport que j'exécute en ce moment avec toute la simplicité de la croyance catholique, apostolique et romaine, sur l'existence des miracles anciens, sur la possibilité de nouveaux miracles, sur la nécessité de preuves incontestables pour y croire ; sur le danger, le crime même d'accréditer de faux miracles ; mais aussi sur le danger peut-être de ne pas contribuer autant qu'on le peut, qu'on le doit surtout, à rendre publiques et authentiques les merveilles du Seigneur.
Je déclare donc, au moment où je puis faire un voyage peut-être, long, voyage aussi qui peut-être m'a fait porter plus loin mes épreuves très réfléchies, je déclare que d'après même ce que j'ai cru devoir annoncer à ce qu'il convient de donner suite exacte de ce rapport, que j'exige qu'il soit soutenu de la déclaration des trois médecins qui les ont soignées depuis longtemps et de celle de leur Supérieure, de leurs compagnes et enfin des pharmaciennes qui; les voyant journellement dans un état facile à comparer à celui qui a précédé leur cure merveilleuse ; oui que ce présent rapport soit ainsi appuyé et motivé avant qu'il soit offert même à l'examen de Monseigneur ou des Commissions envoyées par sa Grandeur, et cela par le respect que j'ai pour les accessoires mêmes des preuves constatant les miracles que Dieu opère dans l'ordre surnaturel. L'immortel ouvrage du grand Pape Benoît XIV sur la béatification des Saints doit ou peut du moins être consulté par quiconque me taxerait de rigorisme dans la difficulté que j'apporte à recevoir comme preuve du crédit de Notre Vénérable Fondateur auprès de Dieu même des guérisons subites avant que la maladie ait été aussi bien confirmée que cette guérison et sa véritable permanence.
D'après cet exposé vraiment théologique, je crois être autorisé à témoigner pour mon compte, que je crois savoir très certainement que quelques grains de poussière du tombeau de M. de Montfort (très vénéré jusque dans le fond de la Bretagne) ayant été mis sur la tète de ma chère et vénérable mère par sa sœur alors Supérieure générale des Filles du Saint-Esprit, quand ma mère était sur le point de mourir sans avoir assez de présence d'esprit pour recevoir dignement les derniers sacrements, tout à coup le trouble occasionné par la terrible situation de trois de ses fils à la fois en danger de péril, chacun de son côté, sous la hache révolutionnaire, le trouble existant depuis plusieurs mois en France, le délire fit tout à coup tellement place à la paix, au désir pieux et à la satisfaction de recevoir les derniers sacrements, de recevoir son Sauveur, qui allait bientôt être son juge ; place à la satisfaction peut-être plus sensible encore de bénir trois de ses enfants et petits-enfants réunis auprès de leur mère expirante, que sa chère sœur, nia vénérable tante, qui me l'a raconté elle-même n'eut jamais plus de joie qu'en voyant cet effet merveilleux du simple attouchement de la poussière du tombeau de notre saint Instituteur. La mienne ne fut pas moindre, en apprenant d'une bouche si véridique ce qui m'annonçait presque certainement le bonheur dont ma mère était allée jouir dans le temps même où j'étais caché et ma tête mise à prix pour la cause unique de ma foi persécutée sous Robespierre.
De tout ce que ci-dessus, je garantis, sur mon honneur et sur cette foi que je préfère de beaucoup à l'honneur, la vérité, et prie Dieu que si c'est sa volonté toujours sainte, II en lire sa gloire et la manifestation de la sainteté de son Serviteur et Ministre apostolique Louis-Marie Grignion de Montfort, Instituteur des Missionnaires du Saint-Esprit et des Filles de la Sagesse
A Saint-Laurent-sur-Sèvre, ce 16 juin 1816.
Y. F. Duchesne.
S. G.

 
[Texier J.-M.] Histoire de la Compagnie de Marie depuis la Révolution jusqu’à 1842, Tome II, Saint-Laurent sur Sèvre (Vendée), 1924, pp. 168-171.
 
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